RENFORCER LE SYSTÈME PÉNAL POUR METTRE FIN AUX AGRESSIONS VISANT LES PERSONNES ATTEINTES D’ALBINISME

Amnesty International est vivement préoccupée par ce qui semble être une nouvelle vague d’agressions et de meurtres de personnes atteintes d’albinisme au Malawi. Au cours des trois derniers mois, il y a eu officiellement six attaques visant des personnes atteintes d’albinisme : meurtres, dégradation de sépulture, tentatives d’enlèvement et violences physiques.

L’État est tenu, au titre de la Constitution du Malawi et des traités internationaux qu’il a ratifiés, de protéger les droits à la vie, à l’égalité, à la justice et aux réparations de toute la population. Malgré certaines avancées juridiques, des modifications de lois et une condamnation publique par le gouvernement malawien des agressions commises contre des personnes atteintes d’albinisme, les violences persistent.

Le 17 novembre, la police a intercepté deux hommes à moto à un barrage routier placé à Mulanje, près de la frontière entre le Malawi et le Mozambique. Ceux-ci ont abandonné leur véhicule et se sont enfuis dans un champ voisin en laissant derrière eux un sac noir. Dans ce sac, les policiers ont découvert des bras et des jambes, dont une personne atteinte d’albinisme venait manifestement d’être amputée. La police a ouvert une enquête sur cette affaire.

Il faut que les autorités diligentent une enquête approfondie, efficace et impartiale sur les meurtres et le trafic de parties du corps de personnes atteintes d’albinisme, de sorte que les victimes et leur famille puissent accéder à la justice sans subir de discrimination. Le Malawi a l’obligation, aux termes de sa législation nationale et du droit international, de protéger les personnes atteintes d’albinisme et de rendre justice aux victimes de ces agressions et de ces meurtres.

Amnesty International demande également au gouvernement de renforcer la collaboration transnationale en matière de maintien de l’ordre et d’enquêtes, ainsi que l’entraide juridique avec les pays frontaliers. Des études ont montré qu’un grand nombre de crimes commis contre des personnes atteintes d’albinisme revêtent un caractère transfrontalier et ont lieu dans des régions frontalières.

Au vu des risques croissants auxquels les personnes atteintes d’albinisme sont confrontées, l’État doit adopter le Plan d’action régional sur l’albinisme afin de garantir la promotion et la protection de ces personnes. Amnesty

International exhorte en outre les chefs d’État et de gouvernement d’Afrique australe à s’engager en faveur de la protection des personnes atteintes d’albinisme dans la région et à lancer un plan d’action régional pour lutter efficacement contre les agressions et le trafic de parties du corps de personnes atteintes d’albinisme.

COMPLÉMENT D’INFORMATION

Les personnes atteintes d’albinisme subissent une discrimination structurelle et systématique dans toute l’Afrique australe.Elles continuent de craindre pour leur vie au quotidien. En effet, elles sont activement pourchassées et tuées dans de nombreux pays de cette région car certaines parties de leur corps sont recherchées.

Depuis 2014, environ 152 personnes atteintes d’albinisme ont ainsi été tuées au Malawi, au Mozambique, en Tanzanie et en Zambie. Il s’agit d’une pratique courante dans les zones frontalières, particulièrement entre l’Afrique du Sud, l’Eswatini (ex-Swaziland), le Malawi, le Mozambique, la République démocratique du Congo, la Tanzanie et la Zambie.

Les défaillances du système pénal, comme la lenteur du traitement des affaires, la falsification et la disparition d’éléments de preuve, et la mort de suspects en détention, favorisent l’impunité, ce qui amène les agresseurs de personnes atteintes d’albinisme à penser qu’ils ne seront pas inquiétés.

Note terminologique :

Le terme « personne atteinte d’albinisme » est préférable au terme « albinos », souvent utilisé avec une connotation péjorative. (Source : https://albinism.ohchr.org/fr/about-albinism.html)